20 juin 2021. Douzième Dimanche du Temps Ordinaire

Chers frères et sœurs, 

C’est curieux, chez les marins, ce besoin de faire des phrases. Les disciples, sur leur petite barque battue par la tempête, pourraient se contenter de pousser des cris et des hurlements, mais non ; ils ont besoin de réveiller Jésus pour lui dire ce qu’ils ressentent : « Maître, nous sommes perdus ; cela ne te fait rien ? » Que signifie réellement cette phrase, et pourquoi est-elle au centre de cet évangile ? 

Pour la comprendre, il faut repartir de l’évangile de dimanche dernier, dont l’évangile d’aujourd’hui est la suite immédiate. Jésus en Galilée commence son enseignement : d’abord pour quelques disciples, puis pour d’autres encore, et progressivement la foule qui l’écoute devient de plus en plus importante. Tout le monde est passionné, pendu à ses lèvres. Comme le micro n’a pas encore été inventé, Jésus trouve une solution : il répartit la foule sur le rivage de la Mer de Galilée, puis il monte sur une barque qui s’éloigne du rivage de quelques mètres, et, de là, il parle. Ce dont il parle, pendant des heures, c’est de ce qu’il appelle le règne de Dieu. Dieu, dit-il, n’est pas absent de ce monde qu’il a créé, mais au contraire il y règne, c’est-à-dire qu’il agit comme un roi le ferait dans son royaume, avec puissance et autorité, mais aussi avec une infinie discrétion. Et Jésus, par des paraboles, compare ce règne de Dieu avec le règne végétal : par exemple, avec la croissance invisible d’une petite graine plantée dans le sol, qui finit par produire, selon son espèce, un épi de blé ou un grand arbre. 

Vous aurez donc compris deux choses : premièrement, que Jésus est déjà sur la mer avec ses plus proches disciples ; et, deuxièmement, que ce dont il vient de parler durant des heures, c’est de la confiance : Dieu est là, tout proche, et il fait pousser sa vie au milieu de la nôtre. Le soir est arrivé, et Jésus fait aux disciples une demande étrange : « Passons sur l’autre rive. » La Mer de Galilée n’est pas très grande, et l’autre rive n’est pas très loin, mais cette mer possède aussi un micro-climat redoutable : des tempêtes terribles peuvent s’y déclencher sans prévenir, les marins le savent bien. Traverser la mer de Galilée en pleine nuit, c’est à peu près comme vouloir traverser le Vercors d’Est en Ouest par une nuit d’orage, sur des chemins de randonnée, dans une vieille R14 : ce n’est pas vraiment une bonne idée ! Pourtant, personne ne dissuade Jésus de cette traversée, et les voilà partis, les disciples à l’avant, et Jésus endormi à l’arrière sur un oreiller… Vous connaissez la suite : « Maître, nous sommes perdus ; cela ne te fait rien ? »

Cette phrase, il me semble que nous pouvons l’interpréter au moins de deux manières. Souvent, on l’entend comme un cri de révolte : « Nous, les disciples, nous allons mourir, et toi, tu n’en a rien à faire : tu te moques de notre souffrance, tu nous abandonnes. » Mais je crois que l’on peut aussi l’entendre comme une expression de la surprise des disciples : « Nous tous (toi aussi) nous allons mourir : mais pourquoi es-tu aussi calme, aussi paisible ? Comment fais-tu pour ne pas avoir peur ? Quel est ton secret ? » Et j’ai tendance à plutôt comprendre la phrase de cette manière, puisque les disciples, malgré leur angoisse, continuent d’appeler Jésus « Maître », donc à croire en son autorité. Et Jésus, réveillé par cette parole, montre son autorité sur la mer, il la fait taire aussitôt. 

Donc, ces deux évangiles parlent bien de la même chose : le règne de Dieu, sa présence, son amour pour nous. L’un en parlait de manière théorique, par des paraboles, et l’autre en parle de manière pratique, dans la vie. C’est triste, nous fait comprendre Jésus, quand la vie chrétienne est incohérente : lorsque nous disons que nous croyons en Dieu mais que jamais nous ne faisons appel à lui. Les disciples viennent d’entendre Jésus pendant toute la journée leur parler de la confiance en Dieu, et dès qu’un danger arrivent, ils baissent les bras, ils se disent qu’ils sont perdus, sans avoir un instant l’idée de demander l’aide de Dieu. 

Chers Layana, Shanys et Thibault, l’évangile de ce dimanche ne parle pas de la première communion… et paradoxalement, il en parle ! Car dans l’eucharistie, ce ne sont pas des idées qui vous sont données, ni des valeurs, mais c’est une rencontre avec Dieu. Dieu est présent dans votre vie, et il veut y régner, c’est-à-dire faire de vous ses amis et ses collaborateurs. Il a une mission, une aventure à vous confier, à chacun, et cela suppose que vous lui fassiez confiance, que vous lui fassiez de la place dans votre vie. Dans un instant, l’organiste va jouer quelques accords d’un choral de Jean-Sébastien Bach intitulé Wer nur den lieben Gott läßt walten, c’est-à-dire : « Celui qui laisse Dieu régner sur sa vie. » C’est cela, l’eucharistie : avec amour, avec confiance, laisser Dieu régner sur votre vie et la rendre plus belle. Jésus veut être présent dans votre vie : voulez-vous être présent dans la sienne ? 

Amen.

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