Dimanche 8 novembre-Trente-Deuxième Dimanche du Temps Ordinaire

Chers frères et sœurs,

Si vous êtes paroissiens de notre ensemble de Champagne, Dardilly, la Duchère et Ecully, vous savez sans doute que cette date du 8 novembre est une date particulière. Il y a presque un an, nous l’avions choisi pour organiser une grande journée de fête interparoissiale, et il y a précisément six mois, nous avions largement annoncé ce rendez-vous. Et nous nous demandions comment faire pour trouver une église assez vaste pour rassembler tous les membres de nos paroisses… Ce 8 novembre, paradoxalement, nous sommes à la fois tous confinés et tous réunis, et en quelque sorte nous avons trouvé une église assez grande, cette petite chapelle dans laquelle nous disons la messe, et internet qui nous permet de vous rejoindre dans chacun de vos foyers. Donc, pour commencer, à vous tous, joyeuse fête de notre ensemble paroissial !

Comme pour souligner notre frustration, la parabole que nous entendons ce dimanche résume tout ce qui nous est à nouveau interdit. Les mariages sont autorisés, mais à six personnes maximum, les grands repas sont purement et simplement supprimés, les lampes sont éteintes pour cause de couvre-feu, et les sorties à la rencontre de l’époux ne sont pas prévues dans les cases des feuilles d’attestation de déplacements dérogatoires. Tout au plus est-il possible d’aller chez les marchands, et encore, s’ils vendent de l’huile et non des livres. Bref, rejouer matériellement cette parabole se révélerait aujourd’hui très difficile…

Pourtant, et au-delà des détails, cette parabole nous rejoint aussi dans ce que nous sommes en train de vivre. Il est question d’une attente interminable, dans la nuit, de quelqu’un en qui une grande espérance est mise. Dix jeunes filles, dont tout porte à penser qu’elles sont les dix témoins de l’épouse, ses dix meilleures amies, se tiennent pendant des heures sur le seuil de la salle du repas des noces, attendant l’époux qui tarde à arriver. Le mariage a déjà eu lieu – les fiancés sont déjà devenus des époux, et il reste à faire la fête. Alors, on attend. Et c’est essentiellement cela, l’histoire de cette parabole : il ne se passe pas grand-chose, il faut simplement prendre patience – ce qui n’est pas simple. C’est un peu la même intrigue que celle du Désert des Tartares, ce roman fameux de l’écrivain italien Dino Buzzatti, l’histoire d’un officier envoyé dans une citadelle à la frontière de son pays et qui, toute sa carrière durant, attend un ennemi mystérieux, les fameux Tartares, qui n’arrivent jamais ; et finalement, au moment où ils arrivent enfin, il est si malade qu’il faut l’évacuer à l’arrière du front : il a manqué le grand rendez-vous avec l’Histoire qu’il avait si longtemps préparé…

Il est donc aussi question d’un rendez-vous manqué, d’une injustice, semble-t-il. Spontanément, nous pourrions faire une lecture morale de cette parabole, y voir la confrontation de deux groupes, celui des pauvres et celui des égoïstes, et condamner les jeunes filles qui, malgré leurs grandes réserves d’huile, refusent de les partager. Or Jésus fait la lecture exactement inverse de cette histoire, et les jeunes filles aux réserves d’huile trop faibles se voient traitées, selon les traductions, d’« insouciantes », ou d’« insensées », ou même de « folles », en somme, traitées sans ménagement. Pourquoi une telle dureté ?

Le problème, c’est justement que ces jeunes filles ont manqué le rendez-vous qui était leur raison d’être. Leur mission, c’était d’être prêtes à sortir à la rencontre de l’époux. Ce n’est pas grave d’avoir sous-estimé les doses d’huile. Ce n’est pas grave d’en avoir demandé aux autres. Ce qui est grave, c’est, sous prétexte d’aller à l’épicerie la plus proche, d’avoir déserté sa place, et de manquer l’essentiel pour aller chercher du superflu. Mieux aurait valu partir au-devant de l’époux avec des lampes éteintes, et le chercher dans la nuit, à tâtons, plutôt que de n’être pas là du tout, et d’arriver trop tard pour la fête.

Nous-mêmes, nous avançons à tâtons. Nous ne maîtrisons pas la situation, elle évolue de jour en jour, il faut se résoudre à faire ce que nous n’aimons pas : attendre, s’adapter, improviser. Mais surtout, ne manquons pas le rendez-vous qui nous est donné ! Il en va ainsi de notre fête paroissiale. Nous pouvons la vivre réellement ce matin, dans nos maisons, dans nos familles, dans notre intimité, et prier pour l’avenir de notre Ensemble Paroissial : en dépit de tout, c’est cela l’essentiel. Il en va ainsi de l’eucharistie : malgré la frustration de ne pouvoir être les uns auprès des autres dans une même église, nous pouvons nous unir réellement à la messe célébrée ce matin, dans laquelle l’époux arrive vers nous pour nous être présent : en dépit de tout, c’est cela l’essentiel. Que ce dimanche soit pour chacun de nous un jour de joie et de fête, un jour où nous célébrons un peu plus l’unité de notre ensemble paroissial, puisque c’est le Christ qui en est le cœur et la raison d’être. Dans notre obscurité, écoutons ce cri qui résonne : « Voici l’époux, sortez à sa rencontre ! »

Amen.

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