Dimanche 9 août 2020-Dix-neuvième Dimanche du Temps Ordinaire

Chers frères et sœurs, Que diable – si j’ose dire – allaient-ils faire dans cette galère ? C’est, plus ou moins, la question que devaient se poser les disciples dans la barque ballotée par les flots en furie. Ce n’était pourtant pas une surprise : marins pour la plupart, ils savaient bien que le Lac de Tibériade, sous ses aspects charmants et tranquilles, peut être redoutable : situé à deux cents mètres au-dessous du niveau de la mer et entouré de montagnes, il connaît de forts écarts de températures à cause desquels de violentes tempêtes s’y déchaînent. Sans doute, quand Jésus leur a dit de grimper dans la barque à la tombée du jour et de rejoindre l’autre rive par voie d’eau, avaient-ils tiqués. Ce n’était objectivement pas une excellente idée… Aussi saint Matthieu souligne-il que Jésus les y a « obligés ». Et les voilà maintenant, persuadés que leur dernière heure est arrivée, qui se lamentent : Mais pourquoi lui a-t-on fait confiance ? Si seulement nous étions restés sur le plancher des vaches…Jésus n’a pourtant pas quitté les disciples des yeux et, voyant leur détresse, il les rejoint par le chemin le plus droit et le plus rapide. Au mal de mer des disciples, à leur nausée et à leur peur répond, splendide, l’apparition de Jésus qui, à pied, vient vers eux en marchant sur les eaux du Lac. Saint Matthieu le décrit avec sobriété mais transcrit l’étonnement des disciples devant cette apparition fantasmagorique. Si les paraboles ont généralement bonne presse, on ne peut pas en dire autant des miracles. On se garde souvent d’en parler dans les homélies. Est-ce bien sérieux, au XXIème siècle, de croire encore que les miracles ont eu lieu, qu’ils sont plus que des contes inventés par les évangélistes pour rajouter du merveilleux à l’histoire déjà édifiante de Jésus de Nazareth ? Et comme on est bien plus intelligents aujourd’hui qu’il y a vingt siècles, on trouvera sans doute une explication logique à tous ces vieux miracles…Il n’y a pas très longtemps de cela, quelqu’un avait entrepris de me démontrer comment résoudre l’énigme de la marche de Jésus sur les eaux. Il fallait s’intéresser, disait-il, aux propriétés remarquables des fluides non-newtoniens. Je ne suis pas physicien, et j’espère que les ingénieurs ne m’en voudront pas trop si je simplifie à outrance ; mais voilà ce que j’en ai compris : l’eau est un fluide newtonien, c’est-à-dire que sa visquosité ne change pas selon qu’on l’agite ou qu’on la laisse au repos. En revanche, certains fluides ont des réactions différentes ; ainsi, en mélangeant de l’amidon de maïs à une petite quantité d’eau, on obtient un fluide non newtonien, qui sera plus solide si on le remue, et plus liquide si on ne le touche pas. Ce qui fait que quelqu’un qui court peut traverser une piscine remplie de maïzena mélangée à de l’eau, sans tomber, puisqu’en frappant du pied vivement le mélange, celui-ci devient assez dur pour que l’on puisse marcher dessus. A travers cette explication scientifique, je ne vois pas une résolution du miracle comme si c’était un problème – puisque le Lac de Tibériade est constitué d’eau et pas de maïzena – mais plutôt une source de prière et de contemplation. En somme, on pourrait dire que la foi est un fluide non newtonien. Lorsque Pierre s’arme de foi dans le Christ, il constate qu’il peut marcher et avancer à sa rencontre sur le Lac. Mais lorsqu’il se met à douter, il s’arrête et il commence à enfoncer, jusqu’à ce que le bras du Christ le retienne et le sauve de la noyade. La foi est – comme disait Victor Hugo – « une force qui va », et qui précisément va à la rencontre du Christ, vers là où lui-même avance à notre rencontre. La foi est une dynamique, qui ne laisse pas statique et immobile celui qui la reçoit, mais qui le déplace sans cesse, sans quoi il enfoncera et se noiera progressivement. Pour paraphraser une célèbre citation des Aventures de Rabbi Jacob : « La foi est comme une bicyclette : si elle n’avance pas, elle tombe ! »Chers A. et J., il est précisément question de foi dans la célébration qui nous rassemble. Les fiançailles sont une affaire de ‘fiance’, de confiance, donc de foi. C’est parce que vous avez confiance l’un envers l’autre que vous avez décidé d’un commun accord d’explorer les chemins qui peuvent mener au mariage, chemin beau et exigeant, chemin qui élève et qui dépouille, chemin dont on ne ressort pas indemne, c’est-à-dire, dont on doit ressortir meilleur ! Les fiançailles sont, elles aussi, un fluide non newtonien, qui impose que désormais vous preniez les moyens de vos ambitions, et que vous marchiez d’une bonne cadence et sans peur vers votre objectif, dans le souci de discerner en vérité ce que le Seigneur vous demande… ou vous ordonne de faire. Ne vous laissez pas vaincre par le vertige ! Ne soyez pas l’un pour l’autre des ‘oligopistoi’, des gens de peu de foi, mais mettez-vous à l’écoute du Christ dont la voix résonne dans la tempête comme sur la mer calme, et avancez vers lui dans la joie !Amen.Illustration : Tintin et l’Etoile mystérieuse, par Hergé. La barque de saint Pierre battue par les eaux et le mal de mer des disciples ; à gauche, le Professeur Calice, au nom si remarquablement eucharistique…

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