1. L’Osmie cornue

L’abeille domestique, pourvoyeuse de ce miel qui incarne la richesse de la Terre promise et nourrit même les prophètes au désert, si souvent encasernée dans sa ruche, tire un peu trop la couverture à elle ! Quelque quatre mille espèces d’abeilles sauvages roulent leur brosse à pollen en France métropolitaine et trente ou quarante pourraient bien hanter votre jardin. Et ça tombe bien, car l’Abeille mellifère n’assure qu’une petite partie de la pollinisation de la flore. L’osmie cornue (Osmia cornuta) est l’une des toutes premières qui émergent à la fin de l’hiver. Présente même en ville, c’est l’une des rares abeilles sauvages vraiment faciles à reconnaître. À peu près grande comme un ongle (12 à 15 mm), elle est entièrement hérissée de poils noirs à l’avant du corps, rouille à l’arrière. Le mâle porte en outre un petit masque de poils blancs très visible.

L’Osmie cornue dépose ses œufs dans des cavités déjà existantes de 8 à 10 millimètres de diamètre : fissures, galeries creusées dans la terre ou le pisé par d’autres abeilles, orifices d’aération. La femelle dépose un stock de nourriture composé de pollen et de nectar, ressort, rentre à reculons dans la galerie et pond un œuf. Elle clôt ensuite la cellule avec un bouchon d’argile et répète l’opération jusqu’à ce que la galerie soit remplie (une quinzaine d’œufs). Le dernier bouchon d’argile est alors visible de l’extérieur.

Les œufs du fond, fécondés, donneront des femelles ; les plus proches de la sortie ne sont pas fécondés par la pondeuse et donnent naissance à des mâles, dont le développement est plus rapide. Le développement larvaire occupe toute la belle saison. Les jeunes osmies adultes émergent donc en automne, mais, sagement, elles passeront tout l’hiver dans la galerie pour n’émerger qu’en février suivant. Ce sont les mâles qui sortent en premier. En ces derniers jours de février, on peut les voir dans tous les jardins, recherchant les cavités propres à la ponte, vers lesquelles ils attireront ensuite les femelles.

L’Osmie cornue pollinise les rosacées, les brassicacées, les légumineuses et de nombreux fruitiers. Plutôt que d’installer une ruche d’abeilles domestiques, il est plus judicieux et écologique de mettre à disposition des osmies un gîte formé d’une bûche percée au bon diamètre, ou de cannes de roseaux ou de bambous placées horizontalement. L’ensemble doit être protégé de la pluie et des grands froids.

Si le miel est très fréquemment cité dans la Bible comme symbole de douceur et de confort, l’abeille n’est quasiment pas mentionnée et une seule fois comme productrice de miel : dans Juges 14, 8 une ruche colonise le corps d’un lion tué par Samson, qui en récolte le miel. Ailleurs, l’abeille est surtout citée comme l’insecte batailleur qui poursuit l’homme de son courroux, à tel point que d’une traduction à l’autre, on lit indifféremment abeille ou guêpe ! De la paisible et solitaire osmie, il n’y a ni miel à espérer, ni offensive à redouter. En revanche, et comme aux temps bibliques, sa présence est bien synonyme de prospérité dans nos jardins et nos vergers. Avec toutes les abeilles sauvages, qui passent souvent inaperçues, elle nous rappelle que la Création est infiniment plus riche et plus diverse qu’il nous paraît, même au pied de nos maisons.

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